Ce mois-ci j’ai choisi comme thématique « Tenir un carnet sans dessiner comme une déesse ». Je sais que tu as du mal à commencer un carnet, à le remplir et même à le finir parce que tu as peur de « mal faire ». Aujourd’hui je vais te présenter des carnets raturés à tomber par terre.
Tu as peur de rater ? De raturer ? Tu es persuadée qu’un art journal ou un carnet créatif doit être extrêmement bien réalisé, lisse, parfait ?
Art journal : Des carnets raturés
Ne plus chercher la perfection
Et si on commençait par arrêter de se mettre la pression sur la perfection ? D’abord parce que la perfection est une notion très subjective. Une page parfaite pour toi ne l’est pas forcément pour ta voisin et inversement. Ensuite parce que l’art journal est une pratique pour te détendre ! Si tu te mets la pression, les bénéfices de cette activité deviennent nuls et inexistants.
« Le perfectionnisme c’est de la procrastination en talons aiguilles » Elisabeth Gilbert.
J’aime beaucoup cette citation d’Elisabeth Gilbert. Ce qu’elle veut dire par là c’est que le perfectionnisme est une excuse qu’a trouvée ton mental pour ne pas sortir de sa zone de confort. Je suis sûre que tu t’es déjà dit « Si ce n’est pas parfait, ce n’est pas la peine de le faire ». Du coup bien souvent tu n’as pas fait les choses. Tu as procrastiné !
Imagine la marge de progression que tu aurais suivie si tu avais déjà commencé la première fois que l’envie t’ait venue. La confiance en toi que tu aurais gagnée, le nombre de carnets que tu aurais osé remplir. Au lieu de cela tu es toujours au même point. Tu n’oses pas !
Accueillir les ratés et les ratures
Qui a dit qu’une rature était forcément moche ? A partir de quel moment la société a décidé que rater était une fin en soi ?
Lorsque tu te rends dans un musée et que tu regardes des carnets de notes, des carnets de dessins ou de croquis, lequel préfères-tu ? Celui tout lisse et tout propre qui n’a l’air de ne refléter aucune personnalité ? Ou le carnet raturé, rempli de tentatives, d’expérimentations et de tests ?
Un texte recopié, corrigé, presque photocopié a moins de charme et de valeur à nos yeux qu’un brouillon de texte. Une page écrite à la main, raturée, un peu froissée, pleine de tâches d’encre. Ce papier là nous en dit bien plus sur son auteur qu’une version recopiée non ?
Et bien c’est pareil pour ton art journal ! S’il est trop lisse, trop ressemblant à tous les autres art journal, s’il est trop « propre » il ne dit rien de toi. Or l’art journal est une pratique extrêmement personnelle. Elle t’aide à mieux te connaître, à t’accepter et à te découvrir.
Le but du journal créatif n’est pas de recopier Pinterest, ou d’être une succession de pages de dessins extrêmement bien réalisés mais complètement impersonnels. Tes ratures, tes essais, tes expérimentations et tes tentatives sont ce qui fait de toi une créative. Tu n’as pas besoin d’être une bonne technicienne. C’est même mieux de ne pas l’être. Parce qu’alors c’est ton imagination et ta créativité qui te guide.
Pour te convaincre que les ratures sont aussi très esthétiques, je t’ai fait une sélection de carnets raturés à tomber par terre. Prépare-toi à raturer tous tes carnets.
Les carnets raturés :
Le Journal de Kurt Cobain
Le chanteur de Nirvana était un homme dépressif et très perturbé, il se suicidera d’un coup de revolver dans la bouche. Ses journaux sont très authentiques, raturés, remplis de petits dessins, de croquis et parfois même de BD. Ces pages nous en disent beaucoup, ne serait-ce que dans leur forme, sur leur propriétaire et sur sa personnalité.
Les manuscrits de Marcels Proust
L’écrivain a écrit une œuvre monumentale que l’on étudie encore aujourd’hui. Il a passé sa vie à écrire. Ses cahiers et carnets étaient remplis de textes, de brouillons et tous, je dis bien tous, sont raturés. Il est très intéressant de voir les parties de texte que Proust a corrigées, celles qu’il a ôtées du manuscrit final, celles qu’il a réécrites etc. Sans ces carnets nous ne saurions pas tout le processus d’écriture de l’écrivain, ni sa réflexion sur ses écrits.
Je t’entends déjà me dire « Mais je ne suis pas Marcel Proust, je ne suis pas écrivaine, je ne serais jamais connue etc ». Mais on ne sait jamais ce que l’avenir nous réserve. Sont publiés aujourd’hui des photos, des carnets et des journaux du siècle dernier, redécouverts dans un grenier et passionnants pour les lecteurs d’aujourd’hui.
Et puis, si Marcel Proust, perfectionniste par excellence, n’a pas détruit ses carnets raturés, ratés et truffés de fautes, je suis persuadée que toi aussi tu peux accepter tes ratures et tes essais ratés. Ils font partis de toi et font de toi ce que tu es. Apprécie-les à leur juste valeur.
Ne trouves-tu pas que ces pages sont beaucoup plus intéressantes que les livres de Proust en eux-mêmes ?
Carnet de Croquis de Turner
Très grand peintre, Turner a réalisé énormément de tableaux et notamment des paysages. Pour cela il s’appuyait sur des croquis qu’il avait réalisés sur place de manière très rapide. Dans ses carnets, on retrouve des gribouillis, des esquisses un peu brouillonnes. On est encore loin de ses tableaux terminés mais l’on sent déjà une certaine forme et une esthétique. Pourtant ce ne sont que des lignes et des coups de crayons. Ces pages sont très simples et montrent les essais et les tests du peintre.
Turner avait les capacités techniques de réaliser des croquis mieux finis, plus évolués et plus réalistes. Mais ce n’est pas ce qui l’intéressait. Il captait ce que le paysage lui faisait ressentir, l’atmosphère qui s’en dégageait. Le réalisme n’était pas son but. Et si on appliquait la même chose à nos carnets ?
Carnet de Croquis de Monet
Comme Turner, c’est l’ambiance et les sensations qui intéressaient Monet dans un paysage. Le réalisme n’a donc pas sa place dans ses carnets de croquis. Ceux-ci sont remplis de dessins et de gribouillis un peu gauches, très minimalistes et à l’allure brouillonne. On dirait presque que Monet les a fait de sa main gauche ou les yeux fermés. Ici il n’y a ni dessin académique, ni mise en couleur réaliste. Et pourtant ces pages sont magiques, elle nous en dit beaucoup sur Monet, sur son approche de la forme et de la ligne. Ce n’est pas la technique que nous admirons mais le regard du peintre sur les paysages et les choses.
Tous ces journaux et carnets ont en commun la recherche, la tentative mais aussi l’échec. Ils n’étaient certainement pas tous au goût de leur artiste respectif. Mais nous sommes bien contentes que ces derniers ne les aient pas détruits, cachés ou pire encore : Qu’ils ne les aient jamais remplis.
J’espère que ces carnets t’auront montré qu’un carnet sans rature n’est pas un carnet créatif et que la créativité sans essai et échec n’est pas réellement de la créativité.
Tu te sens prête à commencer un art journal ? Choisis-le parmi les carnets de La Sardine Plastique.
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