Déconstruire le mythe de l’artiste maudit

 

Quand on pense au statut d’artiste aujourd’hui, on imagine surtout un homme entre deux âges, dans un atelier ou un bureau, la nuit, sale et pas douché depuis des jours en train de peindre dans la pénombre à la lueur d’une bougie. C’est le mythe de l’artiste maudit

 

Il est si bien ancré que si un artiste actuel réussit et gagne bien voire très bien sa vie, on estime que c’est un vendu et que son œuvre est commerciale. Mais qui sommes-nous pour en juger ? 

 

Ce mythe de l’artiste maudit impacte également notre propre créativité. Il est, en partie, la raison pour laquelle tu n’oses pas et tu n’assumes pas ta créativité. Dans cet article, je vais déconstruire ce mythe et t’aider à le dépasser. 

 

Qu’est-ce que le mythe de l’artiste maudit ? 

 

Il s’agit d’un stéréotype très répandu sur le mode vie des artistes et sur leur personnalité. Voici quelques-unes des idées reçues sur les artistes. 

 

idées reçues sur les artistes

 

  • L’artiste serait anticapitaliste :

 

Parce que les métiers artistiques sont motivés par une passion, il est fréquent de croire que l’artiste n’a pas besoin d’argent, voire pire qu’il le rejette. L’argent serait l’ennemi de son art et la richesse la fin de son inspiration. 

 

  • L’artiste serait pauvre :

 

Parce qu’il refuse de gagner de l’argent, l’artiste est forcément pauvre. Il vit dans de mauvaise conditions de vie et n’a pas d’ambitions

 

  • L’artiste vivrait en marge de la société : 

 

Il tient par-dessus tout à sa liberté et il est prêt à tout sacrifier pour elle. Il ne se plie pas aux conventions sociales et il vit comme il l’entend. Il ne croit pas à la fidélité conjugale, il est volage, rebelle et contre toute contrainte. 

 

  • L’artiste serait incompris :

 

De par sa mise à l’écart de la société, l’artiste est une personne incomprise, rejetée par les gens normaux. Personne ne comprend ses œuvres ni ses intentions et personne ne le soutient. 

 

clichés sur l'artiste

 

  • L’artiste ne pourrait réussir seul :

 

Étant incompris, l’artiste est incapable de vendre ses oeuvres. Il a besoin d’un mécène ou d’un galeriste pour réussir. Il devient par la même dépendant de lui. 

 

  • L’artiste créerait dans la souffrance : 

 

C’est la souffrance qui serait au cœur de l’inspiration de l’artiste. Sa mise au ban de la société et sa soif de liberté irréaliste le rendrait en colère, triste et déçu. C’est de ces émotions négatives que naitraient ses plus grandes œuvres. Les émotions positives ne lui inspireraient rien. 

 

  • L’artiste travaillerait nuit et jour : 

 

Ce serait le seul moyen à sa disposition pour réussir : travailler sans relâche. Et comme les émotions négatives sont son inspiration, il est constamment déçu de ce qu’il crée. L’artiste serait perfectionniste. Persuadé que son œuvre n’est jamais assez bien. 

 

  • L’artiste serait irresponsable

 

Épris de liberté et constamment insatisfait, l’artiste est complètement irresponsable. Il est constamment en retard, ne sait tenir aucun délai, emprunte de l’argent sans pouvoir le rembourser et n’a pas de vie stable. 

 

Cette liste n’est pas exhaustive et il y en bien d’autres idées répandues sur les artistes. Si tu en as d’autres, donne-les moi en commentaire. Mais d’où viennent ces idées et ce mythe de l’artiste maudit ? 

 

D’où vient le mythe de l’artiste maudit : 

 

un mythe tenace

 

Le statut d’artiste n’a pas toujours eu mauvaise presse et encore moins cette image misérable. Il a été encensé, encouragé au cours des siècles passés et les familles d’artistes étaient fières de ce statut. 

 

Ce n’est qu’au 19ème siècle, avec l’arrivée de la photographie que la fonction des artistes à radicalement changée. Avant, les artistes faisaient un travail de témoins, de conteurs et de mémorialistes. Ils réalisaient les portraits de familles, peignaient les guerres passées, les paysages de l’autre bout du monde ou représentaient une histoire mythologique. 

 

Et puis la photographie est arrivée. Les familles ont pu se faire tirer le portrait beaucoup plus vite et pour beaucoup moins cher. Les guerres étaient photographiées en tant réel et les images étaient bien plus fidèles à la réalité. Les paysages de l’autre bout du monde étaient photographiés de façon plus objective. Il n’y a que la mythologie que la photographie ne pouvait fixer. 

 

Les peintres et artistes se sont retrouvés au dépourvu. Ne sachant comment se réinventer. Mais les plus jeunes d’entre eux y ont vu une liberté. Ils ont décidé de s’affranchir des codes graphiques en vigueur jusque là et on cherché à développer leur propre style. C’est ainsi que sont arrivés les impressionnistes par exemple. Puis plus tard les cubistes, les peintres abstraits etc 

 

Après des siècles de représentation codifiée, les mécènes et les amateurs d’art ont eu bien du mal à comprendre et à accepter ses mouvements. D’où le cliché de l’artiste incompris. Et comme les experts en art ne comprenaient pas, ils n’exposaient pas ces artistes et ne leur achetaient pas leurs œuvres. Les artistes n’ont pas beaucoup gagné d’argent. Mais ils croyaient en leur travail et ils ont continué à créer coûte que coûte. D’où l ‘image de l’artiste pauvre et en marge de la société

 

C’est la période que l’on a appelé la bohème. En référence aux bohémiens qui vivaient dans la pauvreté et de par leur itinérance, étaient soit disant libres. En gros on les comparait à Esméralda. La bohème a été décrite par de nombreux artistes, en peinture ou en écriture. Par zola dans son roman L’œuvre, par Rimbaud et Verlaine etc. 

 

De ces écrits et de ces peintures, ont été tirés des films, d’autres romans, des chansons etc. Cette pop culture a véhiculé le mythe de l’artiste maudit jusqu’à nos jours. 

 

Pourtant l’image de l’artiste flânant en opposition au travailleur est ancrée depuis plus longtemps que le 19ème siècle. Repense à la fable de la cigale et la fourmi par exemple.

 

En quoi le mythe de l’artiste maudit est-il faux :

 

Il est faux parce qu’il suppose que tous les artistes du monde et de l’histoire fonctionnent et fonctionnaient de la même façon. Nous avons rencontré assez de gens pour savoir que nous réagissons et pensons différemment même si nous avons le même métier. 

La preuve, Henri Matisse a peint des danses joyeuses dans ses tableaux alors qu’il luttait contre un cancer. Loin de créer dans la souffrance, il s’est servi de l’art pour se changer les idées. 

De nombreux artistes gagnent leur vie avec leur art aujourd’hui. Ne serait-ce que dans le milieu de la chanson, du cinéma ou du théâtre. Et si le montant des salaires peut parfois nous sembler un peu déraisonnable, cela ne nous choque plus. Alors pourquoi cela nous choque-t-il toujours quand il s’agit de peintre, de sculpteur, de photographe ou de tout autre art ? 

 

En quoi le mythe impacte notre créativité : 

 

Depuis notre plus tendre enfance, la société n’a pas vraiment encensé le statut d’artiste. Elle a elle-même véhiculé le mythe de l’artiste maudit. En créant, donc en dessinant, en brodant, en tricotant, en faisant notre passion dans notre coin nous avons l’impression d’aller à l’encontre de ce que la société nous a appris. Nous sommes persuadées que ce n’est pas un vrai métier, que cela doit se pratiquer dans le secret, que c’est une honte et une perte de temps. 

 

Nous ne créons pas dans la souffrance et nous sommes donc sûres de ne pas vraiment être artistes ni créatives. Je t’entends d’ici dire “non non mais c’est une toute petite activité, que je fais pour moi seule”. Nous ne voulons pas être mises au ban de la société et donc nous n’assumons pas cette créativité. 

 

Tu vois à quel point ce mythe est nocif pour ta créativité ? A quel point il est important de s’en défaire pour assumer sa créativité ?

 

pour booster sa créativité

 

 

Se défaire du mythe de l’artiste maudit : 

 

Un pas à la fois. Ce mythe est tellement ancré en nous que tu n’arriveras pas à t’en défaire en un jour. Mais en ayant conscience que c’est un cliché et qu’il n’est pas réel, tu peux déjà améliorer ton statut de créative chaque jour. Commence par accorder du temps à ta créativité. Cesse de la faire passer en dernier. Tu as le droit d’être créative et de vouloir passer du temps à créer. 

 

Ensuite tu peux commencer à créer un peu plus devant les autres, ou alors à montrer un peu plus tes créations. D’abord à des personnes bienveillantes, pour être sûre de ne pas recevoir trop de commentaires négatifs qui te feraient revenir dans ta tanière. La suite c’est de te t’assumer et de te présenter en tant que femme créative. Oui oui, sans bafouiller, sans bégayer et sans minimiser. 

 

L’étape finale c’est de le crier sur tous les toits et d’en être fière !  au point d’exposer tes créations chez toi et de les offrir autour de toi. Ou même pourquoi pas de franchir le cap et de les vendre. Dans le cadre légal, cela va de soi.

 

J’espère que cet article t’aura aider à prendre conscience du mythe de l’artiste maudit et t’invitera à le déconstruire aussi pour assumer ta créativité.  

 

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