Cette année Noël je me suis fait un cadeau, j’ai acheté la BD Anaïs Nin : Sur la mer des mensonges. J’ai adoré ! Elle présente très bien l’écrivaine, ses relations et une partie de sa vie. En plus le dessin est extraordinaire. Fait, je pense, aux crayons de couleurs, ils sont un mélange de rouge, de bleu et de vert. En Bref cette BD est magnifique. Elle m’a rappelé qu’il y a quelques années j’ai lu : Anaïs Nin, Journal d’enfance 1914 – 1919. Ce journal m’a marqué et je le trouve excellent pour se décomplexer sur l’écriture, surtout l’écriture d’un journal. Je te propose de te le faire découvrir et de t’en inspirer .
Une petite présentation d’abord :
Anaïs Nin est une autrice américaine née de parents d’origine cubaine. Elle est née à Paris en 1903 et est morte à Los Angeles en 1977. Elle est connue pour la publication de ses journaux intimes et pour ses récits érotiques.
Elle a écrit ce journal de l’âge de l’âge de 11 ans jusqu’à ses 16 ans. Il commence lors de son départ avec sa mère et ses frères pour New York en 1914. Son journal semble être un confident à qui elle peut confier ses doutes, ses peurs, ses humeurs mais aussi ses joies et son amour pour la France ! Amour qu’elle exprime beaucoup dans des poèmes de sa composition. Elle raconte l’absence pesante de son père et son intégration en Amérique. Les premières années, son style est celui d’une fillette de 11 ans, avec ses fautes d’orthographes, de grammaire et de syntaxe. Au fur et à mesure des jours son style s’affirme, aidé par l’écriture régulière et des amies de sa mère qui lui apprennent les règles du récit.
Ce livre se lit très facilement. On peut lire tous les paragraphes quotidiens ou bien choisir quelques passages dans un mois pour ce faire une idée de la vie de l’autrice. On y découvre une écrivaine en devenir, ses rêves de petite fille, sa foi en dieu et son caractère bien trempé.
Extrait n°1 :
« 11 Mai
Je me demande si quand je laisse passer beaucoup de jours sans écrire, est-ce que mon journal croit que je l‘ai abandonné ? Oh non ! Jamais. Je ne suis pas une ingrate heureusement, et je promets à mon confident de ne jamais l’abandonner, oh non, jamais, jamais. J’ai déjà ressenti beaucoup de remords parce je n’ai pas commencé mon journal plus tôt. Mais je reconnais avec justice que c’est seulement quand j’ai commencé à écrire mon journal que mes idées ont commencé à vouloir se confier, s’épancher. A qui aurais-je pu confier toutes les pensées qui me remplissent l’esprit, sinon à un journal ? Confident que j’aime, me promets-tu de toujours garder mon cœur que je t’ai donné, les pensées qu’à toi seul j’ai exprimées. Oh ! Réponds-moi ? Oui, n’est-ce pas, quand même je suis sûre que personne ne voudra t’écouter si tu te mettais à dire tout ce que je t »ai donné ou confié. Non, personne n’écouterait es idées d’une folle comme moi. Aussi je ne crains pas. […] Mais une chose dont je suis sûre c’est à part mon journal, je n’épancherai mon cœur avec aucune autre personne. Je n’aurai aucune amie intime, rien que toi, cher journal, si tu me quittes, si tu me méprises, comme il est naturel, je garderai mes pensées quoique cela me coûte beaucoup. »
Anaïs Nin, comme toutes les petites filles, personnifie son journal et le considère comme un ami.
Extrait n°2 :
« 1er Juillet
La nuit je pleure souvent et je pense : « Hélas, si je pouvais être un homme, ah, je me vengerais de l’affront que veulent nous donner nos ennemis. Que je serai joyeuse si je pouvais mourir sur le champ de bataille après avoir fait mon devoir. » Et je frémis, je tremble, je serre les poings en reconnaissant que je ne suis même pas une demi-graine. Je suis si petite. Je devrais avoir une peau d’homme et mon âme n’aurait qu’à accomplir une chose tellement désirée. Je me serai peut-être contentée d’être une femme et je serais une infirmière : « Puisque je ne puis donner la vie je la conserverai aux autres. » Combien me faut-il ? Quatre ans , quatre interminables années pour être une demi-femme, pour avoir 16 ans ! Mais si je pouvais me couper les cheveux… (Vaine garniture) et mettre une bonne casquette de soldat, puis faire briller mes yeux, et ma volonté me faisant tenir une arme, mon âme prête et mon ardent amour pour la patrie occupant toutes les forces… Peut-être… Peut-être ferais-je un… soldat. Je n’ose y songer. Ce serait la réalisation de mon plus cher rêve de françaises. Après cela je pourrais être contente et je pourrais dire, non point en rêve : « Je me suis battue pour la France. »
La flamme patriotique semble emporter Anaïs ! Etant aux Etats-Unis, elle ne vit la guerre qu’à distance. Mais je trouve ce passage plutôt révélateur de son caractère et de sa lucidité.
Extrait n°3 :
« Elle me fit monter dans la bibliothèque et quelques minutes après je me sentis tout à fait à l’aide devant elle. Je ne m’occupais plus de me tenir droite, ni de ne pas faire de maladresses. En entendant ses explications sur le rythme de la poésie, je me suis retrouvée dans ce que j’appelle mon milieu. Après une bonne explication sur certaines règles dans la poésie elle me montra les défauts de mes poésies, qui « ne manquaient pas d’idées mais je règles ». […] Après cela, trouvant en Mme de Sarlabous la première personne qui comprends une grande parties de mes idées et impressions, je lui ai parlé de mon journal, de mes goûts, de mes pensées en général, de mes opinions, de mes impressions, de tout. En voyant qu’elle me comprenait, qu’elle m’approuvait, j’avais de la peine à contenir ma joie. Je lui dis que j’aimais les légendes par-dessus tout. Alors elle m’a dit : « Mais vous aimez les légendes parce que vous avez l’âme poétique, ma chère enfant ! »
Anaïs découvre que d’autres personnes ont les mêmes idées qu’elle. Alors même que dans sa famille on la trouve dramatique et on la craint folle.
Extrait n°4 :
« 19 Août
[…] Je relisais mon journal il y a quelques jours mais au lieu d’être contente je me suis fâchée souvent avec moi-même pour les sottises que j’ai écrites, et j’ai voulu arracher les pages où elles étaient mais Maman a vu mon geste et m’en a demandé la raison, et comme je lui expliquais elle m’a dit de ne pas les arracher, que ces sottises me feraient rire plus tard et j’apprendrais à ne plus les faire. Peut-être ce que je dis en ce moment est une ou plusieurs sottises que je reconnaitrai dans quelques années mais si j’allais toutes les arracher que resterait-il de mon journal, de ma vie qui est une sottise elle-même par son éternelle monotonie ?? Je leur ferai grâce à mes sottises passées, et je les relirai quand je voudrais rire. Ainsi qu’est-ce qui me faisait croire il y a 2 années que papa arriverait le jour de Noël ? L’espérance ? Non, La foi ? Non. Je crois que j’étais naïve en ces temps-là et je croyais que Noël devait vraiment être marqué par un merveilleux événement comme dans les contes, dans ces contes naïfs que je croyais. J’étais sûre que ma vie était de même que celle des histoires et je trouvais naturel que quelque chose arrive. »
Je me suis retrouvée en lisant ces lignes. Si même Anaïs Nin se trouve ridicule, il est normal que nous aussi. N’ayons plus peur de notre regard futur.
Bonus :
« 17 Février
Après tant de jours sans écrire, je mets une ligne pour dire pourquoi. Maman m’a expliqué que les jours où je n’avais rien à dire et que je n’avais pas envie d’écrire je ne devais pas écrire car j’écrivais trop mal. Donc maintenant j’écrirais de temps en temps car c’est toujours la même chose. »
Comme quoi on a tous du mal à écrire au quotidien !
Je trouve ce journal plutôt distrayant à lire. Il nous montre qu’un quotidien qui nous paraît morne peut être intéressant pour d’autres. Mais surtout j’aime l’idée que l’autrice parle beaucoup de ses émotions et de ses sentiments. Plus qu’une suite de faits, ce journal nous en apprend beaucoup sur la pensée d’Anaïs Nin. Ou du moins sur ses pensées d’enfance. On suit aussi toute son évolution, on voit ses opinions changer et sa pensée se transformer. Elle garde un œil critique sur son travail et n’hésite pas à se moquer d’elle-même.
Voilà un livre qui pourra te redonner courage pour écrire au quotidien ! L’as-tu lu ? Qu’en as-tu pensé ?
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